La France décomposée

Publié le par sébastien

Manifeste des "indigènes de la République", dont j'ai déjà dit ici tout le mal que j'en pensais, création du CRAN (Conseil Représentatif des Associations Noires) et du collectif Devoirs de Mémoires, débat enflammé sur le passé colonial de la France, autant d'épisodes qui obligent la France à regarder en arrière.

Une question me vient à l'esprit : pourquoi maintenant ?

Maintenant, parce que les émeutes des banlieues ont servi de révélateur : il y a une France exclue, et cette France est colorée. La mixité sociale n'existe pas. L'ascenseur social est une vue de l'esprit. Besoin alors, devant ce pays qui exclut, de se retrouver entre soi. Se retrouver, physiquement, en montant des collectifs. Se retrouver, symboliquement, en refaisant le point sur son histoire.

Cette situation me navre. Parce qu'elle invite à la surenchère.

Il est bon qu'un pays sache d'où il vient. Il y puise des motifs de fierté ou de tristesse. Mais, en tout cas, cela fonde une identité, qui assure la cohésion nationale.

Mais, ici, la chose est nouvelle. Il ne s'agit pas de regarder l'Histoire avec l'oeil avisé du spécialiste qui s'oblige à faire avec la complexité des hommes et de leurs actes. Ici, l'Histoire devient un enjeu politique. Trouver dans le passé les créances d'hier qui assureront les droits de demain. L'objectif politique appelle alors toutes les manipulations.

L'histoire, objective, scientifique, cède le pas à la guerre des mémoires, subjective, irrationnelle. C'est pourquoi le débat de spécialistes, apaisé, devient un débat de militants, excités. Tout devient passionnel.

Le mot de Valéry : "ce qui est simple est faux, ce qui est complexe est inutile" doit être médité par tous ces collectifs, qui, au nom des combats politiques d'aujourd'hui, trahissent la vérité d'hier.

Plus qu'un devoir de mémoire, je préfère le devoir d'histoire. L'histoire est universelle, elle appartient à tous. La mémoire est personnelle, elle fait le lit de tous les excès communautaristes.

L'histoire n'est pas simple et ne peut être réduite à des slogans. Elle est complexe et, en ce sens, inutile aux mouvements cités plus haut. La manipulation devient alors une obligation, pour qui veut passer un message politique.

Méditer aussi Ricoeur : "Nous écrivons et réécrivons l'histoire en fonction des aspirations du présent".

Et urgent, enfin, de proposer un projet à la France. En ayant l'esprit tourné vers demain, la manipulation du passé sera moins tentante. Obligation surtout de mixité sociale : en se côtoyant, on évitera le repli.

Publié dans cinéma

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